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Manuel de Falla

À la fois impressionniste et néo-classique, Manuel de Falla est difficile à cerner, mais il est largement considéré comme le compositeur espagnol le plus distingué du début du XXe siècle. Sa production est petite mais de choix, et tourne en grande partie autour de la musique pour la scène. La réputation de Falla repose principalement sur deux somptueuses partitions de ballet ibériques: El amor brujo (L’Amour, le Magicien), d’où est tirée la Danse Rituelle du Feu (un favori des pops, souvent entendu dans les transcriptions de piano ou de guitare), et le splashy El Sombrero de tres picos (Le Chapeau à trois coins). Il a également gagné une place permanente dans le répertoire de concert avec son concerto pour piano évocateur, Nuits dans les jardins d’Espagne.

Né en 1876, Falla a d’abord pris des leçons de piano auprès de sa mère à Cadix, puis a déménagé à Madrid pour continuer le piano et étudier la composition avec Felipe Pedrell, l’érudit musical qui avait auparavant orienté Isaac Albéniz vers la musique folklorique espagnole comme source de ses compositions. Pedrell intéressa Falla à la musique d’église espagnole de la Renaissance, à la musique folklorique et à l’opéra indigène. Ces deux dernières influences sont fortement ressenties dans La Vida breve (La vie est courte), un opéra (une sorte de Cavalleria rusticana espagnole) pour lequel Falla a remporté un prix en 1905, bien que l’œuvre n’ait été créée qu’en 1913.

Une seconde influence esthétique significative résulte du déménagement de Falla à Paris en 1907, où il rencontre et tombe sous le charme impressionniste de Claude Debussy, Paul Dukas et Maurice Ravel. C’est à Paris qu’il publie ses premières pièces et chansons pour piano. En 1914, Falla était de retour à Madrid, travaillant sur l’application d’un idiome quasi impressionniste à des sujets intensément espagnols; El amor brujo s’est inspiré de la musique folklorique andalouse. Falla a écrit un autre ballet en 1917, El Corregidor y la molinera (Le Magistrat et la jeune fille Meunier). Diaghilev l’a persuadé d’élargir la partition d’un ballet de Léonide Massine pour qu’elle s’appelle El sombrero de tres picos, et des extraits de la partition complète sont devenus un incontournable du répertoire de concert. Entre les deux ballets est venue Nights in the Gardens of Spain, une suite de trois impressions pour piano et orchestre richement marquées, évoquant à nouveau l’Andalousie.

Dans les années 1920, Falla modifie sa direction stylistique, sous l’influence du néo-classicisme de Stravinsky. Les œuvres de cette période comprennent l’opéra de marionnettes El retablo de Maese Pedro (Le Retable de Maese Pedro), basé sur un épisode de Don Quichotte, et un concerto pour clavecin, d’inspiration folklorique maintenant castillane plutôt qu’andalouse. Après 1926, il se retira essentiellement, vivant d’abord à Majorque et, à partir de 1939, en Argentine. Il était essentiellement apolitique, mais la montée du fascisme en Espagne a contribué à sa décision de rester en Amérique latine après s’y être rendu pour un engagement de direction. Il passe ses dernières années dans le désert argentin, au travail sur une cantate géante, Atlántida, restée inachevée à sa mort en 1946.