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Biographie

Gaspard Monge devint comte de Péluse plus tard dans sa vie et il est parfois connu sous ce nom. Son père était Jacques Monge, un marchand originaire de Haute-Savoie dans le sud-est de la France. La mère de Gaspard, dont le nom de jeune fille était Jeanne Rousseaux, était originaire de Bourgogne et c’est dans la ville de Beaune en Bourgogne que Gaspard a été élevé. Au moment de la naissance de Gaspard, Beaune, après une période de déclin, redevenait prospère grâce au succès du commerce du vin.
Monge fréquente le Collège oratorien de Beaune. Cette école était destinée aux jeunes nobles et était dirigée par des prêtres. L’école offrait une éducation plus libérale que les autres écoles religieuses, dispensant un enseignement non seulement en sciences humaines, mais aussi en histoire, en mathématiques et en sciences naturelles. C’est dans cette école que Monge a montré son brio pour la première fois. En 1762, à l’âge de 16 ans, Monge se rend à Lyon où il poursuit ses études au Collège de la Trinité. Bien qu’il n’ait que 17 ans à l’époque, Monge a été chargé d’enseigner un cours de physique. Y achevant ses études en 1764, Monge retourna à Beaune où il dressa un plan de la ville.
Le plan de Beaune construit par Monge va avoir une influence majeure dans la direction que prendra sa carrière, car le plan a été vu par un membre du personnel de l’École Royale du Génie de Mézières. Il est très impressionné par le travail de Monge et, en 1765, Monge est nommé à l’École Royale du Génie comme dessinateur. Bien sûr, dans ce poste Monge entreprenait des tâches qui n’étaient pas tout à fait à son goût, car il aspirait à une position dans la vie qui faisait beaucoup plus usage de ses talents mathématiques. Cependant, l’École Royale du Génie a mis Monge en contact avec Charles Bossut qui y était professeur de mathématiques. Au début, le poste de Monge ne l’obligeait pas à utiliser ses talents mathématiques, mais Monge travaillait à son époque à développer ses propres idées de géométrie.
Environ un an après être devenu dessinateur, Monge a reçu une tâche qui lui a permis d’utiliser ses compétences mathématiques pour attaquer la tâche qui lui avait été confiée. Invité à élaborer un plan de fortification qui empêcherait un ennemi de voir ou de tirer sur une position militaire quelle que soit la position de l’ennemi, Monge a conçu sa propre méthode graphique pour construire une telle fortification plutôt que d’utiliser les méthodes compliquées alors disponibles. Cette méthode utilisait pleinement les techniques géométriques que Monge développait à son époque. Ses capacités mathématiques étaient maintenant reconnues à l’École Royale du Génie et on s’est rendu compte que Monge était quelqu’un avec des capacités exceptionnelles dans les matières théoriques et pratiques.

Bossut est élu à l’Académie des Sciences en 1768 et il quitte l’École de Mézières pour devenir professeur d’hydrodynamique au Louvre. Le 22 janvier 1769, Monge écrit à Bossut pour lui expliquer qu’il est en train d’écrire un ouvrage sur les évolutions des courbes de double courbure. Il a demandé à Bossut de donner un avis sur l’originalité et l’utilité de l’œuvre. Bossut a dû répondre d’une manière très positive car en juin parut une publication dans la Revue Encyclopédique de Monge (sa première publication) donnant un résumé des résultats qu’il avait obtenus. Cet article, dans lequel Monge généralisait les résultats obtenus par Huygens sur les courbes de l’espace (dans le cadre de l’étude du pendule par Huygens) et ajoutait de nombreuses nouvelles découvertes importantes, est décrit en détail dans. L’ouvrage achevé fut soumis à l’Académie des Sciences à Paris en octobre 1770 et lu devant l’Académie en août 1771 (bien qu’il ne fut publié par l’Académie qu’en 1785).
Lorsque Bossut quitte l’École Royale du Génie de Mézières, Monge est nommé pour lui succéder en janvier 1769. En 1770, il reçoit un poste supplémentaire à l’École Royale du Génie lorsqu’il est nommé instructeur en physique expérimentale. Bien que ce soit un grand pas en avant pour la carrière de Monge, il était plus intéressé à se faire un nom en tant que mathématicien dans les cercles les plus élevés. Réalisant qu’il devait obtenir les conseils des plus grands mathématiciens, Monge s’adressa à d’Alembert et Condorcet au début de 1771. Condorcet a dû être impressionné par la profondeur des mathématiques que Monge lui a montré, car il lui a recommandé de présenter des mémoires à l’Académie des Sciences dans chacun des quatre domaines des mathématiques dans lesquels il entreprenait des recherches.
Les quatre mémoires que Monge soumet à l’Académie portent sur une généralisation du calcul des variations, de la géométrie infinitésimale, de la théorie des équations aux dérivées partielles et de la combinatoire. Au cours des années suivantes, il soumet à l’Académie une série d’articles importants sur les équations aux dérivées partielles qu’il étudie d’un point de vue géométrique. Son intérêt pour d’autres matières que les mathématiques a commencé à croître et il s’est intéressé aux problèmes de physique et de chimie.
En 1777, Monge épousa Cathérine Huart et, comme sa femme possédait une forge, il s’intéressa à la métallurgie en plus de ses nombreux intérêts mathématiques et scientifiques. Toujours très impliqué dans l’enseignement à l’École Royale du Génie de Mézières, il y organise l’installation d’un laboratoire de chimie. À partir de 1780, cependant, il consacre moins de temps à son travail à l’École de Mézières puisqu’il est élu cette année-là adjoint géomètre à l’Académie des Sciences de Paris. À partir de cette époque, il passe de longues périodes à Paris, enseignant un cours d’hydrodynamique en remplacement de Bossut et participant à des projets entrepris par l’Académie de mathématiques, de physique et de chimie. Il n’était pas possible de faire tout cela et de donner tous ses cours à Mézières mais il y conservait ses postes et touchait son plein salaire sur lequel il en payait d’autres pour donner quelques cours à sa place.

Après trois ans à partager son temps entre Paris et Mézières, Monge se voit offrir un autre poste, à savoir remplacer Bézout comme examinateur des cadets de la marine. Monge aurait aimé conserver tous ces postes, mais après avoir tenté d’organiser un emploi du temps impossible pendant environ un an, il décida de démissionner de ses fonctions à Mézières, ce qu’il fit en décembre 1784. Au cours des cinq années suivantes, malgré de lourdes tâches d’examinateur, Monge a entrepris des recherches dans un large éventail de sujets scientifiques en présentant des articles à l’Académie sur: –

…la composition de l’acide nitreux, la génération de surfaces courbes, les équations aux différences finies, les équations aux dérivées partielles (1785); la double réfraction et la structure du longeron d’Islande, la composition du fer, de l’acier et de la fonte, et l’action des étincelles électriques sur le gaz carbonique (1786); phénomènes capillaires (1787); et les causes de certains phénomènes météorologiques (1788); et une étude en optique physiologique (1789).

Bien sûr, 1789 fut une année mouvementée dans l’histoire de France avec la prise de la Bastille le 14 juillet 1789 marquant le début de la Révolution française. Cela allait changer complètement le cours de la vie de Monge. Au début de la Révolution, il était l’un des principaux scientifiques de Paris avec un dossier de recherche exceptionnel dans une grande variété de sciences, une expérience d’examinateur et une expérience dans les réformes scolaires qu’il avait entreprises en 1786 dans le cadre de ses fonctions d’examinateur. Politiquement, Monge était un fervent partisan de la Révolution, et ses premières actions furent de montrer son soutien en rejoignant diverses sociétés soutenant la Révolution, mais il continua ses fonctions normales d’examinateur des cadets de la marine et d’une figure majeure du travail de l’Académie. À cette époque, il faisait partie de la grande Commission des poids et mesures de l’Académie.
Louis XVI tente de fuir le pays le 20 juin 1791, mais il est arrêté à Varennes et ramené à Paris, ce qui met fin aux tentatives de partage du gouvernement entre le roi et une assemblée. Les relations avec l’Europe se sont détériorées lorsque l’Assemblée nationale a déclaré qu’un peuple avait le droit à l’autodétermination. La France déclare la guerre à l’Autriche et à la Prusse le 20 avril 1792. Les défaites françaises ont entraîné des troubles en France et, le 10 août 1792, il y a eu de nouvelles révolutions du peuple avec des nobles et du clergé assassinés en septembre. Le 21 septembre, la monarchie est abolie en France et une république est proclamée. Monge se voit offrir le poste de ministre de la Marine dans le gouvernement par la Convention nationale.

Sans manquer de respect à Monge, il était impossible de satisfaire les opinions tout à fait extrêmes de nombreuses personnes, et la période de Monge en tant que ministre de la Marine ne peut être considérée comme un succès. Bien qu’il ait fait de gros efforts dans des circonstances difficiles, il ne survécut que huit mois à ce poste avant de renoncer à la bataille incessante avec son entourage et de présenter sa démission le 10 avril 1793. Pendant quelques mois, Monge retourna à son travail à l’Académie des Sciences mais cela ne dura pas longtemps car, le 8 août 1793, l’Académie des Sciences fut supprimée par la Convention nationale.
Toujours fervent républicain et partisan de la Révolution, Monge a travaillé sur divers projets militaires relatifs aux armes et aux explosifs. Il a écrit des articles sur les sujets et a également donné des cours sur ces sujets militaires. Il continua à siéger à la Commission des Poids et mesures qui survécut malgré la fin de l’Académie des Sciences. Il proposa également des réformes éducatives à la Convention nationale mais, bien qu’acceptées le 15 septembre 1793, elles furent rejetées le lendemain. Telle était la nature volatile des décisions à cette époque instable.
Monge fut nommé par la Convention nationale le 11 mars 1794 à l’organe qui fut mis en place pour fonder l’École Centrale des Travaux Publics (qui deviendra bientôt l’École Polytechnique). Non seulement il a eu une influence majeure dans la création de l’École en utilisant son expérience à Mézières à bon escient, mais il a été nommé instructeur en géométrie descriptive le 9 novembre 1794. Sa première tâche en tant qu’instructeur fut de former les futurs enseignants de l’école qui commença à fonctionner à partir de juin 1795. Les conférences de Monge sur la géométrie infinitésimale constitueront la base de son livre Application de l’analyse à la géométrie.
Un autre établissement d’enseignement, l’École Normale, est créé pour former les enseignants du secondaire et Monge donne un cours de géométrie descriptive. Il était également un fervent partisan de l’Académie des Sciences et a travaillé dur pour que celle-ci soit rétablie en tant qu’Institut national. La Convention nationale approuve le nouvel organe le 26 octobre 1795. Cependant, de mai 1796 à octobre 1797, Monge est en Italie sur une commande pour sélectionner les meilleurs trésors d’art pour les conquérants et les amener en France. Le fait qu’il se soit lié d’amitié avec Napoléon Bonaparte pendant son séjour en Italie revêt une importance particulière. Napoléon avait vaincu l’Autriche et signé le traité de Campo Formio le 17 octobre 1797 qui était un traité exceptionnellement bon pour la France, préservant la plupart des conquêtes françaises. Monge retourna à Paris avec le texte du traité de Campo Formio.

De retour à Paris, Monge reprend ses fonctions précédentes et est nommé au prestigieux nouveau poste de Directeur de l’École Polytechnique. En février 1798, Monge était de retour à Rome, impliqué dans la mise en place de la République de Rome. Dans l’auteur décrit ces événements en utilisant des lettres que Monge a envoyées à sa femme de Rome à cette époque. En particulier, Monge a proposé un projet pour les écoles supérieures de la République de Rome. Napoléon Bonaparte demanda maintenant à Monge de le rejoindre dans son expédition égyptienne et, à contrecœur, Monge accepta.
Monge quitte l’Italie le 26 mai 1798 et rejoint le corps expéditionnaire de Napoléon. L’expédition, qui comprenait les mathématiciens Fourier et Malus ainsi que Monge, fut d’abord un grand succès. Malte est occupée le 10 juin 1798, Alexandrie prise d’assaut le 1er juillet et le delta du Nil rapidement pris. Cependant, le 1er août 1798, la flotte française est complètement détruite par la flotte de Nelson lors de la bataille du Nil, de sorte que Napoléon se retrouve confiné dans les terres qu’il occupe. Monge a été nommé président de l’Institut d’Égypte au Caire le 21 août. L’Institut comptait douze membres de la division des mathématiques, dont Fourier, Monge, Malus et Napoléon Bonaparte. Pendant les moments difficiles avec Napoléon en Égypte et en Syrie, Monge continue à perfectionner son traité Application de l’analyse à la géométrie.
Napoléon abandonne son armée et rentre à Paris en 1799, il détient bientôt le pouvoir absolu en France. Monge est de retour à Paris le 16 octobre 1799 et prend ses fonctions de directeur de l’École Polytechnique. Il a découvert que ses mémoires Géométrie descriptive had avaient été publiés plus tôt en 1799. Cela avait été fait à la demande de sa femme et avait été préparé par Hachette à partir des conférences de Monge à l’École Normale. Le 9 novembre 1799, Napoléon et deux autres prennent le pouvoir par un coup d’État et un nouveau gouvernement, le Consulat, est mis en place. Napoléon nomma Monge sénateur du Consulat à vie. Monge accepta avec plaisir, bien que ses opinions républicaines auraient dû signifier qu’il était opposé à la dictature militaire imposée par Napoléon à la France. La vérité doit être que Monge était: –

… ébloui par Napoléon… et accepta tous les honneurs et cadeaux que l’empereur lui accorda : grand officier de la Légion d’Honneur en 1804, président du Sénat en 1806, comte de Péluse en 1808, entre autres.

Au cours des années suivantes, Monge a poursuivi toute une série d’activités, assumant son rôle de sénateur tout en conservant un intérêt pour la recherche en mathématiques, mais surtout son travail mathématique consistait à enseigner et à écrire des textes pour les étudiants de l’École Polytechnique. Lentement, il est devenu moins impliqué dans la recherche mathématique, puis à partir de 1809, il a abandonné son enseignement à l’École Polytechnique que sa santé a commencé à échouer.

En juin 1812, Napoléon rassembla sa Grande Armée d’environ 453 000 hommes, dont des hommes de Prusse et d’Autriche contraints de servir, et marcha sur la Russie. La campagne fut un désastre, mais en septembre, l’armée de Napoléon était entrée dans Moscou déserte. Napoléon s »est retiré, les Prussiens et les Autrichiens ont déserté la Grande Armée et il y a eu des tentatives de coup d »État contre Napoléon à Paris. Monge fut consterné par la situation et sa santé s’effondra soudainement. Peu à peu, sa santé revint après que Napoléon eut quitté les restes de son armée et regagna Paris pour affirmer son autorité. Après que Napoléon eut un certain succès militaire en 1813, les armées alliées contre lui se sont renforcées. Monge est envoyé à Liège pour organiser la défense de la ville contre une attaque.
Les armées alliées commencèrent à se déplacer contre la France et Monge s’enfuit. Lorsque Napoléon abdique le 6 avril 1814, Monge n’est pas à Paris, mais peu après il revient et tente de reprendre sa vie en main. Napoléon s’est échappé de l’île d’Elbe, où il avait été banni, et le 20 mars 1815, il était de retour à Paris. Monge se rallia immédiatement à Napoléon et lui apporta tout son soutien. Après la défaite de Napoléon à Waterloo, Monge continua à le voir jusqu’à ce qu’il soit mis à bord d’un navire le 15 juillet. En octobre, Monge craignait pour sa vie et s’enfuit de France.
Monge rentre à Paris en mars 1816. Deux jours après son retour, il est expulsé de l’Institut de France et dès lors sa vie est désespérément difficile car il est harcelé politiquement et sa vie est continuellement menacée. À sa mort, les élèves de l’École Polytechnique lui rendent hommage malgré l’insistance du gouvernement français pour qu’aucun hommage ne lui soit rendu.
Dans la carrière politique de Monge est traité avec bienveillance mais G Jorland, dans une revue de cet article, adopte un point de vue plus difficile: –

le mandat au ministère de la Marine a été un échec complet et il a présidé au pillage culturel de l’Italie et de l’Égypte. Si Napoléon a effectivement dit que Monge l’aimait comme une maîtresse, cela prouve que la plus grande clarté mathématique peut aller de pair avec l’aveuglement politique.

Nous avons commenté assez fréquemment les travaux scientifiques de Monge ci-dessus. Il est considéré comme le père de la géométrie différentielle en raison de son travail Application de l’analyse à la géométrie où il a introduit le concept de lignes de courbure d’une surface dans l’espace tridimensionnel. Il a développé une méthode générale d’application de la géométrie aux problèmes de construction. Il a également introduit deux plans de projection perpendiculaires l’un à l’autre pour la description graphique d’objets solides. Ces techniques ont été généralisées dans un système appelé géométrie descriptive, qui est maintenant connu sous le nom de projection orthographique, la méthode graphique utilisée dans le dessin mécanique moderne.
La philosophie de base derrière l’approche de Monge en mathématiques est discutée dans où l’auteur déclare que les objectifs de Monge étaient les suivants: –

… géométrisation des mathématiques basée sur:
(a) l’analogie ou la correspondance des opérations en analyse avec des transformations géométriques;
(b) la classification génétique et la paramétrisation des surfaces par l’analyse du mouvement des lignes génératrices.

Monge considérait l’analyse comme étant: –

… non pas un langage autonome, mais simplement le « script » du « spectacle géométrique en mouvement » qui constitue la réalité.
… new approach s’est adressé aux relations les plus profondes, intimes et universelles de l’espace et à leurs transformations, le mettant en mesure d’interconnecter la géométrie et l’analyse d’une manière fertile, inédite. Des préoccupations pratiques ont amené Monge à percevoir l’objet et la fonction des mathématiques d’une manière nouvelle, en violation des normes formalistes (linguistiques) établies par les patrons approuvés des mathématiques…